Bien peu placent des espoirs en cette nouvelle année. Certains vont jusqu’à parler d'un monde au bord du précipice. Pourtant, il l'a été tant de fois, dans des conditions tellement plus tragiques, qu'il semble bien prétentieux de le croire.
Il est vrai que de nos jours, seule la fin du monde fait vendre. Nos vies sont devenues tellement confortables qu’elles en deviennent parfois ennuyeuses au point de rêver à une apocalypse dont nous serions les derniers survivants, les héros. Au risque de vous décevoir, je ne pense pas que ce sera le cas en 2024. En fait, ce sera peut-être pire, le début d'une dégradation aussi lente qu'un supplice chinois.
Selon les calculs les plus savants, ces quarante dernières années, la moitié de la population mondiale devrait être déjà morte, une bonne dizaine de fois, du fait des inondations, de la sécheresse, de la chaleur, du froid, de la faim, de la surconsommation, de la fin du pétrole, du trop d'énergies fossiles, de la pollution de l'eau, de la terre et de l'air. Pourtant, ces quarante dernières années, la population mondiale n'a jamais autant cru de toute son histoire, n'a jamais été aussi riche, instruite et libre. Les années 90, avec la fin du communisme, de l'apartheid, la démocratisation d'un nombre impressionnant de pays, la fin de conflits armés et le début de la diminution sans pareil de l'extrême pauvreté, ont été sûrement une des décennies les plus lumineuses de l'humanité. Au point de nous aveugler. Nous avons cru en la fin progressive de la guerre, des conflits, de la tyrannie, de l'histoire et même de la mort.
Ces derniers reprennent tous leurs droits et 2024 sera avant tout la dernière chance pour les benêts de le comprendre avant que le pire n'arrive, comme à ces pauvres jeunes Israéliens massacrés lors du pogrom du 7 octobre et qui dansaient non loin de Gaza pour la paix avec les Palestiniens. Cette zone, la plus chaude et la plus complexe de la planète, le Moyen-Orient, occupera sûrement le devant de la scène en ce début d'année. Israël devra peu à peu se réveiller et se rendre à l'évidence. Les Palestiniens, encore une fois, en tuant ses enfants, ne lui ont pas laissé le choix que de tuer les leurs ou de laisser tuer les siens. Mais se faisant, il tue quand même, directement et indirectement, des enfants, et ce n'est pas tenable pour une société si éduquée et conçue comme un refuge contre la barbarie humaine. L'extrême droite israélienne, qui propose de déporter les Palestiniens au final, met, par l'absurde, en face de ses responsabilités la société israélienne. Que faire des Palestiniens ?
User l'Occident encore et encore, jusqu'à la lutte finale du Bloc Central
Israël est déjà touché économiquement par le coût de cette courte incursion dans la bande de Gaza. Elle va sûrement devoir réduire la voilure de son occupation de façon importante. Même s'il arrive à anéantir le Hamas en 2024, par quoi va-t-il le remplacer ? Par une administration israélienne ? Se retirer et laisser les Palestiniens dans leurs ruines ? Alors certains diront que la seule réponse valable est la création d'un État palestinien. Mais qui pour porter cela ? Les États-Unis ? Ils vont être en pleines élections. Les pays arabes ? Aucun n'en veut vraiment ou du moins n'a une vraie volonté pour ce faire. Les Palestiniens ? Mais qui ? Quelle structure ? L'histoire nous a démontré que l'organisation palestinienne est bien trop faible pour négocier face à un État aussi fort que l'État hébreu. Les seules fois où la paix a pu avancer dans cette zone, c'est entre États déjà constitués : Israël-Égypte, Israël-Jordanie. La seule fois où des pourparlers entre Israéliens et Palestiniens ont failli aboutir, c'est quand Bill Clinton a réussi à ce que chacune des parties arrête de déshumaniser l'autre. Il les a fait se rencontrer en terrain neutre, échanger sur tout et rien. Il faudra un mélange de tout cela et avoir des idées disruptives, et ne pas rester sur la "solution à deux États" qui a démontré qu'elle n'en est pas une. On peut, par exemple, dans un premier temps, réunir la Cisjordanie avec ce qu'on appelait autrefois la Transjordanie, aujourd'hui la Jordanie, qui mériterait alors réellement son nom de pays du fleuve Jourdain, qu'elle engloberait. Surtout que désormais plus de 60% de la population jordanienne est d'origine palestinienne, telle que sa reine. Le roi jordanien étant un descendant du prophète, il a une légitimité en Islam dont seul le roi du Maroc peut se flatter aussi. Gaza pourrait être administrée par l'Égypte, le temps qu'un référendum ait lieu sur son indépendance, son rattachement à l'Égypte (où se trouvent nombre de parents des Gazaouis) ou à la Jordanie.
En réalité, les solutions au conflit palestinien sont nombreuses, ce sont les volontés qui manquent tant cette situation, au final, profite à nombre de puissances et dirigeants palestiniens. Ce qui est à craindre en 2024 dans cette région n'est pas un embrasement du monde musulman, il est bien trop désuni. Ou même une attaque groupée de l'Iran et ses proxies, Hamas, Hezbollah, Houthis et Syrie contre Israël, car cela semble bien trop voué à l'échec dans les conditions actuelles. Une victoire de Téhéran ne peut être envisagée que dans le cadre d'une guerre généralisée, débordant complètement les capacités du gendarme américain, avec, par exemple, la Russie attaquant les pays baltes, la Corée du Nord son voisin du Sud et la Chine l'un de ses voisins (Taiwan, Philippines, Inde, Vietnam, etc.). Le plus probable en 2024 est que l'Iran, tout comme la Russie, livre des guerres d'usure dans l'attente de ce moment. Moscou et Téhéran vont sûrement alterner avec le Hamas, les Houthis, le Hezbollah, les milices en Irak ou en Syrie. Dès que l'un sera émoussé, l'autre entrera en action. Tout cela ne fera que confirmer l'alliance militaire stratégique du Bloc Central Russie-Chine-Corée du Nord-Iran en général et de l'Iran et la Russie en particulier. Il y a malgré tout un espoir dans ce Bloc Central, le peuple iranien, qui est sûrement l'un des peuples, avec les Israéliens, les plus éduqués et le plus proche des Occidentaux sur zone. Le régime des Mollahs et ses gardiens de la révolution pour l'instant ont réussi à le faire taire par une répression barbare, mais par la même ont fait de leur propre pays une poudrière.
De fait, l'hégémonie allemande sur l'UE va continuer de servir les intérêts russes
Passons rapidement sur la Chine, car ses jeux de pouvoir sont bien trop opaques pour en comprendre quoi que ce soit, sauf que les partisans de « l'économie avant tout » sont peu à peu écartés au profit de nationalistes, que le pays n'arrive plus à engranger des succès économiques, dépense sans compter pour son réarmement et que les stratèges américains ne se demandent plus si la Chine va attaquer Taiwan, mais quand.
La Russie, quant à elle, devrait continuer ses actions d'usure des capacités de l'Occident en Ukraine, en Afrique, au Moyen-Orient et peut-être en Amérique latine, mais aussi de déstabilisation de nos pays. La comparaison de Poutine des frontières russes avec la marée est excellente. La marée, quand on la voit en action, est particulièrement inquiétante, impitoyable, mais comme à chaque fois, elle érode à peine la côte, se retire et disparaît. Nous nous rassurons, nous nous habituons à ses attaques et reportons à plus tard les mesures à prendre. Tel le lièvre dans la fable de La Fontaine, nous croyons que nous aurons toujours le temps de rattraper la tortue. « Rien ne sert de courir ; il faut partir à point ». Or, l'Europe face à la Russie continue de procrastiner. Alors que, doucement mais sûrement, elle fait son œuvre, telle la marée, elle sape à leurs bases le rivage et à force les falaises s'effondrent sous leur poids. C'est la stratégie du judoka Poutine, utiliser la force de l'adversaire pour le déséquilibrer. Il a lamentablement échoué à soumettre l'Ukraine à l'empire russe, mais continue d'attaquer, de se retirer, puis de revenir, de grignoter. Il envoie des signaux positifs aux Occidentaux, ces agents et idiots utiles nous rassurent sur les buts de la Russie qui ne seraient autres que le sud de l'Ukraine. Écoutez bien le message subliminal des rassuristes et pacifistes occidentaux. Il est toujours le même, il est vain de vouloir résister et de se réarmer. Il change juste d'argumentation selon les milieux. Chez les « progressistes », l'argument est que la Russie n'attaquera jamais car nous sommes bien trop forts et qu'il n'y a aucune inquiétude à avoir face à des Russes moyenâgeux. Chez les « populistes », il ne sert à rien de se réarmer car la Russie est bien trop forte, trop puissante, pour que nos pays décadents puissent la rattraper. Aussi, il ne faudrait pas abuser de sa patience, car elle pourrait se déchaîner, nous envoyer des vagues de migrants d'Afrique, nous déstabiliser, allumer le feu dans le monde arabe, nous priver de pétrole en s'alliant avec l'Arabie saoudite. La réalité est tout autre.
Comme tout le Bloc Central Chine-Russie-Iran-Corée du Nord, le Kremlin n'est pas encore prêt, il a besoin de temps et surtout que nous restions dans notre léthargie. Il va utiliser tous ses moyens (guerre en Ukraine, militarisation des migrants, attaques informationnelles, influenceurs occidentaux pro-russes) et proxies (Algérie, Niger, Burkina, Mali, Hamas, Houthis, Syrie, Hezbollah, Corée du Nord, etc.) pour nous user au maximum sans nous éveiller. Nous attaquer frontalement en 2024 paraît peu probable, Poutine aurait bien trop de chances de perdre. Il a plutôt intérêt à agir, telle la marée, nous saper, tout en nous rassurant via notamment ses agents agissant en toute impunité dans nos pays. Il est impératif pour Moscou de tout faire pour continuer à se réarmer sans que nous en fassions de même. Aussi, en 2024, pour rassurer l'UE et la puissance hégémonique à sa tête, l'Allemagne, elle aura plutôt intérêt à laisser miroiter à Berlin un retour au gaz russe bon marché dont son industrie a tant besoin, via la promesse du gel du front et de s'en tenir aux gains territoriaux actuels et quelques grignotages à peine visibles de l'Ukraine. En même temps, Moscou devra rassurer les Chinois, échaudés par l'invasion bâclée de l'Ukraine et l'épisode Prigogine, sur le fait qu'elle est une alliée sur laquelle on peut compter. Poutine va devoir démontrer qu'il tient son pays d'une main de fer, ainsi que ses positions en Afrique et arrive à mystifier les Occidentaux en usant leurs capacités de défenses.
Ainsi, en 2024, on devrait continuer d'entendre l'Allemagne avoir des discours fermes sur la Russie et le réarmement de l'Europe, tout en persistant à livrer systématiquement et délibérément un armement qui ne peut en aucun cas assurer une quelconque victoire aux Ukrainiens. Il est temps de voir la réalité en face. Depuis que l'Allemagne, après sa période de flottement pendant toute l'année 2022, a repris en main l'UE en mai 2023, si l'on fait abstraction des discours, concrètement, sur le terrain, le soutien à l'Ukraine est en très net recul. Tous les soutiens de l'Ukraine qui se sont réjouis de la perte du pouvoir du PiS en Pologne, s'ils ont un minimum d'honnêteté intellectuelle, doivent aujourd'hui reconnaître que depuis, la situation ne cesse d'empirer et que les conservateurs polonais étaient bien le moteur principal de l'aide à l'Ukraine. Hélas, les naïfs qui croient encore à la fable de l'Allemagne, gentil géant bienveillant, sont encore ultra-majoritaires dans les élites européennes. L'arrivée au pouvoir du très germanophile M. Tusk en Pologne et la faiblesse politique particulièrement inquiétante de la France ne feront qu'accentuer cette mainmise de l'Allemagne sur l'UE et donc servir, dans les faits, les objectifs de la Russie.
Une France, sous très haute tension et principale cible de Moscou en 2024 ?
La France, avec son armée, son industrie militaire et nucléaire, ainsi que sa place au sein du conseil de sécurité, est le pays d'Europe ayant à la fois le plus de capacités pour tenir tête à la Russie et le plus d'intérêts à le faire. Nombre de prétendus patriotes français, en réalité des agents russes, regrettent le gaz russe bon marché, mais celui-ci était surtout destiné à l'Allemagne (le gaz russe représente moins de 3% du mix énergétique de la France). C'est avec ce gaz russe qu'elle a consolidé son hégémonie économique sur l'UE. Pour la maintenir, Berlin a tenté de neutraliser le dernier avantage concurrentiel de la France : le nucléaire. Avec le Brexit et l'Allemagne à genoux à cause de la fin de son gaz russe bon marché, la France a une opportunité unique, depuis deux siècles, de rééquilibrer les relations de pouvoir sur le continent européen. La guerre en Ukraine permet de redistribuer les cartes en Europe en faveur de la France.
Cependant, en raison de l'impéritie de ses politiques publiques de ces 20 dernières années, la France représente aujourd'hui un quart de toute la dette de la zone euro. Le niveau de sa dette et sa dynamique sont de plus en plus comparables à ceux de la Grèce avant la crise. De plus, les niveaux élevés de prélèvements obligatoires, parmi les plus élevés du monde, et les taux d'intérêt ne laissent plus aucune marge de manœuvre à un pays en proie à des divisions profondes, avec des élites politiques et médiatiques particulièrement discréditées, et en pleine crise politique se transformant peu à peu en crise de régime. Sans oublier le cas particulier du président Macron, dont l'autorité se réduit comme peau de chagrin chaque jour.
Pour couronner le tout, 2024 sera l'année à la fois des Jeux Olympiques de Paris et des élections européennes que le principal parti d’opposition, le Rassemblement National de Marine Le Pen, devrait remporter haut la main, dans un pays où 80% des élites sont en faveur de l'immigration et 80% de la population y est opposée. En cas de succès, Emmanuel Macron pourrait gagner une petite année de répit. Cependant, compte tenu de la situation actuelle du pays, des tensions internationales, de l'influence de la Russie et du profil de ses proxies (Algérie, Hamas, Syrie, etc.), un été de chaos en France n'est pas à exclure pendant les élections et les JO. Comment ne pas craindre pendant ces derniers des vagues de migrants en provenance de pays contrôlés par Moscou (Mali, Niger, Algérie, Libye, etc.), des attentats islamistes, des émeutes dans les banlieues, des pillages, des attaques et vols de touristes en série, faisant vaciller le pays européen le mieux armé pour résister à Moscou et qui a toujours été le précurseur de tous les grands changements en Europe?
Interrogeons-nous une minute. Quel est le plus grand point de discorde en Occident? Entre les élites et le peuple? Entre les « progressistes » et les « populistes »? Entre la gauche et la droite? Sur quel sujet pendant les repas de famille se dispute-t-on le plus, sinon l'immigration? C'est sûrement, et de loin, le sujet sur lequel les élites occidentales cèdent le moins à leurs populations, qui exigent partout l'arrêt de l'immigration. Plus les gouvernements progressistes s'acharnent à imposer par tous les moyens l'immigration de masse, plus leurs populations se rebellent et votent pour les « populistes ». Cette scission entre les élites et les peuples occidentaux sur cette question est notre principale faiblesse. Or, Moscou, via ses alliés africains, contrôle 80% des couloirs de migration et a les moyens de lancer une grande vague migratoire sur l'Europe. La majorité des influenceurs « non-progressistes », anti-immigration et « antisystème » sont pro-russes. Une grande partie des rares partis en Europe s'opposant réellement à l'immigration de masse est particulièrement bienveillante envers la Russie. Dans ces conditions, quel intérêt Moscou aurait-il de ne pas actionner tous ces outils pour nous déstabiliser sur notre principale faiblesse et de voir arriver au pouvoir des partis qui lui sont proches? Aucun.
2024, année de la dernière chance pour l'Europe ?
Restent les États-Unis, dont la puissance militaire continue de surpasser allègrement tout le monde. Avec moins de 3% de l'armement américain, les Ukrainiens ont arrêté les Russes et étaient en passe de les défaire si Washington avait continué de les fournir massivement. L'économie américaine, quant à elle, semble tenir le coup et garder sa première place au point que la FED, la banque centrale américaine, pourrait même s'offrir le luxe en 2024 de baisser ses taux directeurs et relancer encore plus fort et avant tout le monde l'économie américaine.
La vraie interrogation sur les États-Unis est de savoir s'ils seront tentés ou non, face aux menaces et à la nouvelle agitation du monde, par un repli, par l'isolationnisme. Même si ce n'était pas le cas et malgré leur puissance, les Américains n'ont pas les capacités de mener une guerre seuls contre tout le Bloc Central. Si les États-Unis optent pour l'isolationnisme ou sont embourbés dans des guerres dans l'Indopacifique et le Moyen-Orient, la Russie en profiterait immédiatement pour imposer sa loi aux Européens qui, sans le bouclier américain, sont incapables de se défendre plus de 15 jours. Bien sûr, le pire n'est jamais certain, mais l'histoire étant tragique, l'Europe doit se préparer à une guerre avec la Russie, seule, sans l'appui américain. Nous devons nous réarmer massivement. Conservateurs et progressistes doivent se réconcilier et oublier les récriminations des uns et des autres. Les élites européennes doivent au plus vite renouer avec leurs populations, accepter notamment une vraie pause dans l'immigration de masse. L'unité faite et en nous réarmant massivement, les Russes se rendront à l'évidence : nous attaquer conduirait inévitablement à leur cuisante défaite. Hélas, pour ce faire, il faudra bien trois ans, grand minimum. Or, le Bloc central se réarme à une telle vitesse que, selon de nombreux experts, nous n'avons plus que 3 à 5 ans devant nous avant que ses capacités militaires soient supérieures à celles des Américains.
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