Nouvelle édition de la CPAC à Budapest
Après le succès de la première édition européenne l’an dernier à Budapest, la CPAC, réunion des conservateurs qui gravitent autour des Républicains états-uniens, s’est de nouveau tenue à Budapest début mai.
Alors qu’Orbán est en plein bras de fer avec l’administration Biden, l’organisation de cet événement ne doit rien au hasard. Il est essentiel pour Orbán de montrer, notamment à son électorat et à ses alliés européens – à un an des élections pour le Parlement européen – que ses liens avec les Etats-Unis ne sont pas rompus et qu’il y a encore des alliés de taille.
Dans son discours d’ouverture, Viktor Orbán a annoncé la couleur sans ambages, comme à son habitude. « Nous sommes tous attaqués, aussi bien en Europe qu’en Amérique […], et l’attaque n’est pas de nature économique, nous faisons face à une arme biologique, c’est une attaque virale qui a été lancée contre nous. Ce virus a été développé dans les laboratoires libéraux progressistes. […] C’est un virus nationophage » a déclaré le Premier ministre. « Des hommes sans patrie ne peuvent être libres, ils ne seront que des nomades installés ici et là, et seront les pions de l’élite mondiale ».
Dans un discours qui se veut être une ode au concept même de nation et d’Etat-nation, Orbán a attiré l’attention sur le déclin de l’Occident, notamment quand on le compare au reste du monde, particulièrement sur les plans démographique et économique. Considérant que l’Occident n’est plus leader que sur le plan militaire, il explique que « cela amène nécessairement à des conflits armés, et c’est ce qui se passe aujourd’hui. »
Reprenant l’image du virus pour désigner l’idéologie woke et progressiste radicale, Viktor Orbán a alors continué ainsi : « Ce virus ne s’est pas échappé, il a été produit, multiplié et lâché sur le monde entier. La migration, le gender, le wokisme, ce ne sont que des variants du même virus. » Selon Orbán, l’immigrationnisme et l’idéologie woke procèdent d’une même volonté, celle de détruire les nations, atomiser les sociétés et déconstruire les identités.
Puis, comme il l’avait déjà fait en 2016, Viktor Orbán a souhaité ouvertement la victoire de Donald Trump aux prochaines élections US, après avoir dénoncé la « diplomatie progressiste », qu’il dit être par nature impérialiste, et qui au nom de l’exportation de la démocratie a détruit des pays. « Les progressistes appliquent toujours une politique impérialiste, ils exercent des pressions diplomatiques sur les nations, et ils attendent un alignement : soutenez-vous l’immigration, la propagande de la théorie du genre, la relativisation de la famille, la sexualisation des enfants ? Ceux qui ne sont pas enclin à tout ça est désigné comme ennemis, et la fatwa libérale est alors prononcée contre ceux-là. »
Et de conclure sur une critique souverainiste sans équivoque : « Le dernier objectif en date de la diplomatie impérialisme progressiste est de priver les nations de l’Union européenne de leur droit une diplomatie nationale. »
En conclusion de son discours, Viktor Orbán a alors repris la métaphore virale. « La bonne nouvelle, c’est qu’il n’est plus besoin de rechercher le remède au virus progressiste. Il est ici, en Hongrie. Accessible à tous. Il est gratuit et avec une simple adaptation locale, il peut être implémenté ailleurs et fonctionne. […] Il protège contre tous les variants du progressisme, et en plus, il n’a pas d’effets secondaires. […] Il suffit, avant les élections, d’écrire en lettres immenses et bien visibles sur le drapeau : non à l’immigration, non au gender, non à la guerre ».
Pour l’homme fort de Budapest, le point faible des progressistes reste la démocratie. « Ils savaient déjà, dans la Rome antique, qu’il y a deux façon de prendre une cité : soit on prend les murs de la ville, soit on occupe ses sanctuaires. Je suggère que nous commencions par les sanctuaires, puis, viendront les murs. Nous avons pris de grands sanctuaires européens ces dernières années : Budapest, Varsovie, Rome, Jérusalem ; Vienne n’est pas sans espoir. Mais la vérité est que les deux principaux sanctuaires de la démocratie moderne, Washington et Bruxelles, sont toujours aux mains des progressistes. Agissons pour qu’il n’en soit plus ainsi. »
Le Parlement européen contre-attaque
Sans surprise, l’actualité du mois de mai est de nouveau marquée par le combat entre les autorités de l’Union européenne et celles de la Hongrie.
Et c’est une nouvelle étape dans la dérive des institutions européennes que l’on peut observer aujourd’hui. Cette énième attaque contre la Hongrie, à l’initiative d’eurodéputés extrémistes dans leur vision progressiste et fédéraliste de l’UE, doit inquiéter, car elle est contraire aux traités et menace aussi déjà un autre pays membre, à savoir la Pologne.
De quoi s’agit-il ? Les eurodéputés progressistes, qui font tout pour dénaturer les institutions de l’UE et s’en servir comme outil d’ingérence dans la politique nationale d’un Etat membre théoriquement souverain, ont proposé (et adopté le 1er juin) une résolution pour empêcher la Hongrie de prendre la présidence du Conseil de l’Union européenne au 1er juillet 2024. La Pologne doit prendre la suite six mois plus tard, et déjà il se dit à Bruxelles que si cette mesure aboutit pour empêcher la Hongrie de prendre la présidence tournante, la même chose s’appliquera ensuite à la Pologne pour augmenter la pression sur l’application de « l’Etat de droit », concept jamais défini légalement et de plus en plus subjectif et fumeux.
Quand bien même la présidence tournante a perdu de son importance au fil des années, notamment avec la montée en puissance du Conseil européen, cela reste un outil politique réel qui permet au pays qui préside le Conseil de déterminer l’ordre du jour dans les réunions ministérielles ou en représentant le Conseil lors des sessions de travail conjointes avec les autres institutions européennes.
Alors pour justifier cette mesure qui dépasse les conséquences du Parlement européen, les mêmes mantras sont répétés en boucle, des accusations qui n’ont de poids que parce qu’elles sont répétées sans cesse par une même clique d’eurodéputés et de journalistes, qui ne reposent pas sur des faits, mais sur des opinions. Il est cependant impossible en Europe de l’Ouest de faire entendre ce point de vue puisque quoique dise le gouvernement hongrois et son Premier ministre Viktor Orbán, on répond qu’il s’agit de « provocations » dès lors qu’il exprime un avis différent du mainstream européen. Et lorsqu’il entend défendre les intérêts nationaux hongrois, notamment en terme de protection de la minorité hongroise d’Ukraine ou d’approvisionnement énergétique, on l’accuse de tous les maux.
Il n’y a donc pas de dialogue et le divorce semble être amorcé. Sur le plan légal, la Hongrie s’efforce toutefois de continuer à respecter à la lettre les traités, misant sur son légalisme pour défendre son cas. Mais face à des adversaires qui font ce qu’ils veulent et qui, ouvertement, ne tiennent plus compte des traités et prennent des mesures qui dépassent leurs compétences légales, est-ce bien utile ? On me répondra : que peut faire d’autre la Hongrie ?
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