Vaincre ou mourir : devise du cinéma résistant français

2023-03-19
Temps de lecture 8 min
Le cinéma français, comme beaucoup d’autres, a connu son heure de gloire dans les années 1960-70. Depuis, si des grands réalisateurs ont produit quelques œuvres remarquées, le cinéma français dans son ensemble n’est clairement plus aussi riche et lumineux que dans le passé. Les stars se sont ternies et même les gros budgets ne garantissent plus aucune qualité, ni sur le fond, ni sur la forme.

Une des raisons de ce marasme artistique dans le cinéma français est la domination totale de l’idéologie progressiste, woke, politiquement correcte, qui transforme systématiquement chaque film, au moins en partie, en œuvre de propagande en faveur des canons occidentaux du moment, le tout au détriment de la licence artistique, de la promotion de belles valeurs et du rêve. Plus rien de ce qui donnait son charme si français ne transpire dans les films contemporains. Fini la drague cabotine d’un Belmondo, le charme viril d’un Delon ou la suavité irrésistible d’une Bardot. Oubliés, les rois de France, les Napoléon, les chevaliers et les dames, les héros de la furia francese. Au contraire, la petitesse est mise en avant, les franchouillards sont dénigrés, tout est sujet à raillerie, l’art et la beauté de la complexe et riche histoire de France ne servent que ponctuellement de supports à des récits anachroniques visant à diffuser un poison anti-français et anti-européen.

Et puis, alors que les comédies en faveur du multiculturalisme se suivent et s’enchaînent grâce aux millions d’euros d’argent public injectés pour soutenir cette entreprise de révolution culturelle, un film à petit budget défraie la chronique en France depuis ce mois de janvier 2023. Vaincre ou mourir, réalisé avec à peine 5 millions d’euros, a surpris tout le gotha parisien car il raconte l’histoire de François Athanase Charette de La Contrie, dit Charrette. Et avant de rentrer dans le vif du sujet, précisons une chose. Non, ce n’est pas un grand film. Bien que réalisé pour le grand écran, on a l’impression de regarder un téléfilm. Il est parfois difficile de comprendre ce que disent les personnages et on ne saisit pas bien par moments le parti pris du réalisateur de faire certains mouvements de caméra. À part cela, ma principale critique porte sur les uniformes et le mouvement des troupes. Mais mon œil aiguisé de passionné d’histoire militaire napoléonienne donne peut-être plus d’importance à cet élément qu’il n’en a vraiment.

Serait-ce donc pour ces raisons que l’ensemble de la presse française, à l’exception de quelques médias indépendants de droite, lui est tombé dessus à bras raccourcis ? Tous les films médiocres ou mauvais ne déclenchent pas une telle ire de la presse de grand chemin. Mais alors, quel est le problème pour la presse républicaine ? C’est très simple : Charrette est un héros royaliste et contre-révolutionnaire qui mena au combat de 1793 à 1796 les paysans de Vendée, au nom de la France catholique et royale. Horreur ! Comment peut-on encenser un monarchiste antirépublicain !?

Qui plus est, le film va plus loin : il dénonce les crimes de la jeune République française, que ce soit les colonnes infernales qui firent 40.000 morts civiles, mais aussi les noyades de Nantes de Jean-Baptiste Carrier, qui firent entre 1800 et 5000 morts - prêtres réfractaires, prisonniers de guerre, ou simples civils, hommes et femmes, et même enfants, simplement suspects aux yeux de la République.

Sans concession, sans angélisme ou romantisme moralisateur, le film suit l’épopée tragique de Charrette et de son armée de paysans qui, bien plus que du retour du Roi, étaient désireux de liberté, de justice et du droit de pratiquer la religion catholique alors que la Terreur voulait changer les us et coutumes des Français par la force et le terrorisme d’État. Charrette lui-même, joué par un taciturne Hugo Becker, annonce dès les premières minutes n’être « pas un saint ». Il n’est pas lavé des ses crimes, historiquement prouvés, qui sont par ailleurs représentés dans le film. C’est un homme que seuls les événements amènent à rejoindre l’insurrection, et non le loyalisme à la couronne. Il est volage et infidèle. Bref, Charrette est montré tel qu’il est, c’est un homme finalement ordinaire, mais rattrapé par l’histoire, et qui finit par se couvrir de gloire éternelle par son sacrifice pour quelque chose « qui le dépasse », comme le dit son personnage dans le film.

En cela, l’arc narratif et l’évolution du héros sont rafraîchissants : pas de culpabilisation, pas de manichéisme, mais la beauté d’une tragédie humaine, trop humaine. Le sacrifice pour une cause, la grandeur d’âme, la fidélité, le courage, l’honneur, la valeur de la parole donnée, le sens du devoir, la camaraderie… cette longue liste de valeurs donnent au film un goût particulier, qui efface tous ses défauts techniques tant cela nourrit l’âme. Le public, à la fin du film, applaudit. L’émotion était au rendez-vous, et on réalise avoir vu quelque chose de spécial. Une brèche s’est ouverte dans l’empire progressiste du cinéma français subventionné.

Fin janvier, le film est en septième position du box-office après avoir réalisé plus de 100.000 entrées la première semaine d’exploitation, et mi-février, le film cumul près de 260.000 entrées. Boudé par les cinémas, seules 188 salles le proposent au public. Pas de publicité sur les grandes chaînes et les journaux ne font que l’attaquer. Pour le député d’extrême-gauche Alexis Corbière, ce film n’est rien de moins qu’une « offensive réactionnaire » et le fait de parler des crimes méconnus de la République française est une « volonté d’effacement » ! Cette même gauche qui milite sans cesse pour la repentance de la France et de la République pour la colonisation, Vichy ou encore la guerre d’Algérie est vent debout lorsqu’un modeste film traite une petite partie des crimes de la Terreur, période pourtant contestée de la Révolution même parmi les plus ardents républicains. Les tartuffes sont démasqués, voilà quelque chose de plus à mettre au crédit de cette œuvre.

On parle beaucoup d’OVNIs en ce moment, et ce film en est un assurément. Mais il n’a pas vocation à être un cas unique et isolé. C’est que le Puy du Fou, entreprise à succès de l’homme politique de droite catholique Philippe de Villiers, a réalisé avec ce film un coup d’essai pour changer la face du cinéma français et lancer une contre-révolution culturelle française à travers le 7e art. Espérons seulement que cette ambition louable ne finisse pas en histoire terriblement française, à l’image de l’épopée de Charrette : dans le panache, certes, mais aussi la défaite. Car pour les amoureux de la France derrière ce projet qui sont devenus les résistants du cinéma national, il va falloir également vaincre ou mourir.

 

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